3.06.2018

Clair obscur

© Jérôme Delépine

Aujourd'hui les éclats de rire d'Amélie dans l'immensité de la forêt. Le regard tendre et malicieux de Madame Mime, et ses bras grands ouverts, comme une invitation à l'embrasser. Aujourd'hui le visage de cire de Madame Eau. Le drap blanc, lisse. Les larmes de culpabilité de sa fille, son regard d'enfant perdue. Les mots échangés pour panser sa blessure, ma main autour de son épaule pour porter avec elle le poids de son désespoir. Aujourd'hui les petits fours mondains. Les discours, le réseau professionnel, les powerpoint et les serrages de mains. Aujourd'hui les yeux apeurés de Madame Felicidad, qui veut voir sa mère. Le temps passé à ses côtés, à regarder des photos de ses petits niños, pour apaiser son esprit tourmenté. Aujourd'hui fouler la terre, regarder les chiens courir au loin, marcher la tête dans les arbres nus, dans le bleu du ciel printanier. Aujourd'hui les sanglots de Monsieur Scaphandre, enfermé dans un corps qui se fige, cloîtré dans un langage de larmes. Aujourd'hui le sourire radieux de Madame Grande, en route pour préparer un délicieux gâteau avec son amie qui la suit sans sourciller. Aujourd'hui l'odeur du café qui emplit le bureau. Le gobelet chaud dans les mains tremblantes de la fille de Madame Voyage, partie sans prévenir dans un autre monde. Aujourd'hui le soleil qui réchauffe la peau et illumine les âmes de la Maison. Aujourd'hui, le tango de la mort et de la vie, le balancier perpétuel de l'ombre et de la lumière...

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